La criée est un principe de vente portuaire qui marque les ports de pêche depuis des siècles. Au début de leur ère, les pêcheurs y voyaient un biais efficace pour écouler les produits de pleine fraîcheur issues de leur dur labeur. À peine les chalutiers arrivés au quai de débarquement; les poissons et crustacés étaient (presque) déjà achetés par les poissonneries locales.
De nos jours, le système est resté intact, bien que cela reste rare d’entendre des crieurs proposer des lots de poissons. Tous les produits de la mer (y compris en aquaculture) doivent passer par ces halles réglementées pour effectuer une traçabilité d’une pêche artisanale. La vente du poisson est régie par les Chambres de Commerces et Industries (CCI) régionales où se trouvent les halles à marées; et le mareyage entre en piste pour garantir au pêcheur comme aux clients une formulation de paiement. En effet, ces opérateurs présents sur les lieux sont désormais acteurs des enchères effectuées à l’aide de boîtier numériques. Ils veillent au prix de départ mais surtout au plancher minimal requis pour une commercialisation constantes des arrivages.
Le type de pêche est aussi un critère majeur du tarif proposé ensuite aux poissonneries traiteur. Le mareyeur contrôle les labels, et valorise les flottes de bateaux dont le soin est porté sur la limitation de leur impact sur l’environnement.
Pour bien comprendre comment fonctionnent les criées, on vous propose de découvrir les coulisses du circuit emprunté par les produits de la mer pour arriver jusqu’à votre assiette.
Rétrospective sur l’apparition des criées
C’est à la fin du Moyen-Âge, que la vente à la criée à fait son apparition dans les ports de Venise, Gênes, Marseille, Anvers et Londres.
Ces villes ont développé des systèmes de vente de poissons directement sur le port d’arrivage. Les produits issus de la pêche sont débarqués puis triés dans des bacs pour former des lots.
Ces opérations donnaient lieu à une vente à la “criée”, du fait que les vendeurs interpellaient de vive voix les acheteurs potentiels.
Ensuite, les crieurs faisaient monter et descendre les enchères à la voix pour que la foule puisse interagir. Il fallait faire vite car à l’époque pas de chaîne du froid et encore moins de chambre froide permettaient de stocker les poissons et fruits de mer.
Une fois la vente lancée, les acheteurs surenchérissaient avec leurs propres signaux, bien connus du crieur. Les produits de la mer partaient alors aux meilleurs enchérisseurs.
Quand le lot était attribué, l’acheteur recevait un ticket précisant la quantité, l’espèce, et la date d’achat.
Rapidement, la vente à la criée devient un événement quotidien qui permet aux marins-pêcheurs d’écouler facilement leur pêche selon le principe d’offre et de la demande.
Sans intermédiaires; les acheteurs (bien souvent des restaurateurs ou petits commerçants), devaient préparer eux-mêmes les filets, terrines, soupes et autres conserves.
De nos jours, la vente à la criée à laissé place à des halles à marée. Les cris n’ont plus lieu d’être puisque les enchères sont effectuées par un biais informatique.
Mais par abus de langage, le terme “criée” reste bien ancré. Il est assimilé aux vendeurs de poissons et notamment aux poissonniers qui prenaient souvent le relais pour appâter les chalands.
La halle à marée : Vente en gros de produits frais
Les halles à marée sont aujourd’hui les premières places de vente des produits de la mer. Les crieurs ont laissé place à des enchères qui sont désormais informatisées en. fonction des horaires de marées.
Une fois que les flottes de bateaux sont rentrées à quai, la halle à marée reçoit les marchandises triées dans des bacs. Les portes s’ouvrent aux professionnels vers 6 heures du matin.
Il existe deux processus d’achat qui diffèrent d’une criée à une autre.
Dans certaines halles, les lots de poissons, coquillages ou crustacés défilent sur un convoyeur (tapis roulant) devant les acheteurs.
Dans d’autres, un cadran d’enchères est installé sur un petit véhicule électrique où l’opérateur (crieur) se déplace d’un lot à l’autre avec tous ses acheteurs potentiels.
Il faut savoir que les criées portent une attention toute particulière au type de pêche et aux débarquements des produits.
Dans les grands ports de pêche Français, les ventes sont séparées en deux catégories.
Les pêcheurs hauturiers débarquent des volumes industriels d’espèces capturées aux filets ou à l’aide de dragues lors d’opérations pouvant aller de 7 à 15 jours.
Ils présentent principalement du merlu, du cabillaud, du lieu etc. Ces produits du large sont vendus uniquement aux mareyeurs.
De l’autre côté, les pêcheurs côtiers proposent des espèces plus variées et captées à la journée ou sur 3 jours maximum. Les poissons sont considérés comme plus valeureux puisqu’ils sont pêchés artisanalement. Ces bateaux débarquent notamment de la sole, des langoustines ou encore du Rouget-Barbet.
La criée côtière se tient ouverte pour tous les professionnels qui ont besoin de produits frais péchés.
Pour les plus petites halles à marée, les deux types de vente cohabitent; tel un marché au poisson géant où les professionnels peuvent sélectionner les produits qui iront directement composer leurs futurs plateaux de fruits de mer. (Huîtres, moules, crevettes, homard, Saint-Jacques, saumon fumé, crabe, oursins, etc.)
Une fois les poissons vendus, que se passe-t-il après ?
La criée, c’est le maillon de la chaîne qui se situe entre les pêcheurs et les transformateurs et distributeurs. Elles portent donc la responsabilité de la traçabilité des produits.
Pour les marins-pêcheurs, la halle à marée est également devenue une garantie de paiement. En effet, pour y avoir accès, les professionnels acheteurs doivent effectuer un dépôt de garantie. Cette caution reflète leur montant maximal avec lequel ils pourront enchérir.
Sachant que pour acheter des produits de la mer dans une halle à marée, il faut soit être mareyeur (grossiste), transformateur, poissonnier, restaurateur ou distributeur. La plupart des professionnels ayant un étal ou un rayon poissonnerie privilégient la pêche durable certifiée par un conditionnement de pêcheries contrôlées par les mareyeurs qui sélectionnent et veillent à acheter du poisson frais.
Mais la plupart du temps, les mareyeurs sont les acteurs principaux de la place de marché. Leur immense capacité d’achat leur permet d’avoir une excellente marge de négociation et de décrocher les meilleures enchères.
D’ailleurs, bien souvent, les restaurateurs et les poissonniers préfèrent passer directement par les mareyeurs.
Car au-delà de pouvoir proposer des tarifs plus compétitifs, ils peuvent également préparer des filets ou transformer les produits pour être “prêt à être consommé”.
De plus, les mareyeurs étant les seuls à pouvoir acheter des poissons issus de la pêche du large, les poissonniers viennent compléter leur approvisionnement en fonction de la variété réclamée par leurs clients.
Ce processus gagnant-gagnant fait la force de la filière pêche Française. Les consommateurs s’y retrouvent également puisque de plus en plus de labels voient le jour. Ils permettent une transparence totale sur la traçabilité des produits de la mer et l’impact de leur capture face à la biodiversité.